De « Croître plus » à « Croître mieux » : l’opportunité de l’économie circulaire
Article écrit par Thomas Bordenave.
Qu’ont en commun :
- Le blocage du Canal de Suez par le porte-conteneurs Evergreen Marine, pendant 7 jours, pour une perte de 400 MUSD par heure de retard des marchandises ?
- La pénurie de semi-conducteurs, qui affecte la production de Smartphones, consoles de jeux et automobiles depuis début 2021 ?
- L’augmentation historique du prix du bœuf aux Etats-Unis, qui a franchi la barre historique de 1,10 USD la livre, dans un pays qui consomme 13 milliards de burgers par an ?
Tous ces événements sont des exemples de signaux forts de la fragilisation de nos modèles historiques de croissance, avec des impacts directs sur notre quotidien, jusque dans nos assiettes. Leur multiplication pousse vers un nécessaire changement de paradigme. « Croître plus », à tout prix, n’est plus possible. Comment, donc, « croitre mieux », et créer de nouveaux modèles de croissance, plus durables ?
L’économie circulaire : de quoi s’agit-il ?
Si le concept d’économie circulaire remonte à 1991, il n’est pas encore stabilisé. En 2017, pas moins de 114 définitions étaient ainsi recensées. Parmi elles, celle de la Commission Européenne est simple et pragmatique. Elle décrit « L’économie circulaire [comme] une économie « où la valeur des produits, des matériaux et des ressources est maintenue dans l’économie le plus longtemps possible et où la production de déchets est minimisée ».
Ainsi, la valeur d’un produit doit être considérée sur son cycle de vie entier, depuis sa conception jusqu’à son recyclage final, et non plus sur sa valeur marchande uniquement.
Ce changement de prisme permet d’envisager le produit d’une manière plus globale, en valorisant les co-produits et déchets, ou encore en prolongeant les usages avec des produits durables, réparables et réutilisables. Ceci ouvre la voie vers de nouveaux modèles économiques durables.
Une nouvelle vision de la valeur
Mettre en œuvre la transition vers un modèle d’économie circulaire est donc une entreprise ambitieuse. Il s’agit de repenser la façon dont l’organisation crée, capte et délivre de la valeur en interaction avec son écosystème.
- Créer de la valeur.
L’économie circulaire induit une déconstruction progressive du modèle linéaire, pour introduire une notion de « valeur » de plus en plus large. Le déchet, ou le co-produit, devient une ressource. La création de valeur peut s’opérer à plusieurs moments de la vie du produit.
- Capter la valeur.
Les modèles de revenus sont susceptibles de changer avec un modèle commercial circulaire. Prenons exemple d’une entreprise de recyclage. Classiquement, les revenus sont exclusivement tirés par les volumes, avec donc une dimension quantitative.
Dans un modèle axé sur l’économie circulaire, de nouvelles sources de valeur apparaissent, notamment avec la réinsertion des co-produits ou la réutilisation des produits dans l’économie. Une dimension qualitative vient ainsi s’ajouter avec, potentiellement, un impact d’image positif sur l’ensemble des activités.
- Délivrer la valeur.
Les partenariats stratégiques, avec des fournisseurs de technologie et de services externes, existaient déjà pour concevoir, produire, ou livrer. Désormais avec l’économie circulaire, de nouvelles activités, comme savoir réparer, rapporter, ou encore revendre, entraîne l’évolution de ces partenariats et des intervenants dans la chaîne de valeur.
Pour conclure…
L’économie circulaire est une opportunité d’aborder à la fois la production de biens et la création de valeur avec un nouvel œil. Pour ce faire, les entreprises doivent bousculer leur modèle d’affaires, vivre un pivot tout en continuant à assumer leurs missions habituelles.
Cela nécessite de mener une réflexion stratégique s’appuyant sur une analyse approfondie de son écosystème. Pour réussir cette transition, des itérations seront sans doute nécessaires : impossible de remplacer une source d’approvisionnement, de relocaliser une usine ou encore de fabriquer des produits 100% d’origine recyclée instantanément !
La bonne nouvelle est que la complexité de cette démarche est à la hauteur de la récompense : le meilleur usage des ressources, la création de nouveaux emplois, la protection de la biodiversité, ou encore une meilleure croissance économique…
Le chemin vers l’économie circulaire n’est certes pas une ligne droite, mais bien une voie certaine vers le « croitre mieux ».
En savoir plus sur l’Innovation par Julhiet Sterwen.